Comment les entreprises de chiffrement américaines réagissent-elles à la nouvelle stratégie de Trump ?

Rédigé par : Sean Lee, ancien CEO de la fondation Algorand

Traduit par : Felix, PANews

Les cryptomonnaies ont longtemps navigué dans la zone grise entre l'innovation et la réglementation. Alors que les États-Unis poussent à établir un cadre réglementaire, le secteur des cryptomonnaies est confronté à un moment clé qui pourrait débloquer l'échelle, le capital et l'influence mondiale.

Au cours de la collaboration avec le Conseil d'innovation en cryptomonnaie (Crypto Council for Innovation), après plusieurs dialogues avec des leaders de l'industrie et l'écoute des points de vue de différentes parties, un tournant est survenu : le cadre à venir guidera la prochaine phase de développement des cryptomonnaies.

Refondre la politique cryptographique américaine pour améliorer la clarté de la réglementation

Le président Trump a signé un ordre exécutif complet le troisième jour de son deuxième mandat. L'ordre "Renforcer le leadership des États-Unis dans le domaine des technologies financières numériques", publié le 23 janvier, annule une directive signée par Biden en 2022, transformant une position principalement axée sur l'application de la loi en une nouvelle stratégie axée sur la gouvernance proactive. Le 6 mars, Trump a signé un ordre exécutif établissant une réserve stratégique de bitcoins. Cette réserve provient de bitcoins confisqués dans des affaires criminelles, qui ne seront pas vendus, mais détenus comme un actif stratégique à long terme.

La SEC américaine a réorganisé son travail de réglementation des cryptomonnaies en un « département des réseaux et des technologies émergentes », en faisant de cela le point central de l'élaboration de règles à long terme, et a établi un groupe de travail pour élaborer un « cadre réglementaire clair et complet ». La présidente de la SEC américaine, Hester Peirce, a déclaré que l'objectif était de permettre aux entreprises de « faire librement des expériences et de construire des choses intéressantes ». Le vice-procureur général américain, Todd Blanche, a ordonné la dissolution immédiate du groupe d'application des cryptomonnaies nationales (NCET). Le 7 avril, une décision décrite dans un mémo de quatre pages intitulé « Mettre fin à la réglementation par le biais de poursuites » marque un contraste frappant avec les pratiques de l'administration précédente.

Le GENIUS Act, introduit pour la première fois en février 2025, est la première tentative sérieuse à Washington d’intégrer les stablecoins dans un cadre réglementaire clair et soutenu par le gouvernement fédéral. Au moment de la rédaction de cet article, il y a environ 243 milliards de dollars de stablecoins en circulation dans le monde, dont plus de 90 % sont libellés en dollars américains. Le projet de loi propose des normes strictes de stockage, d’audit et de transparence pour les stablecoins, ainsi qu’une interdiction des demandes de soutien gouvernemental. BIEN QUE LE GENIUS BILL N’AIT PAS ÉTÉ ADOPTÉ EN MAI, IL A DÉCLENCHÉ UN RARE EFFORT BIPARTITE ET A OUVERT LA VOIE À UNE FUTURE LÉGISLATION SUR LES CRYPTO-MONNAIES CENTRÉE SUR LE CONSOMMATEUR.

Jusqu'à présent, son impact est évident, l'activité de trading sur le marché des cryptomonnaies a explosé et l'enthousiasme des investisseurs a été ravivé. Par exemple, la société Bitcoin Twenty One Capital a fusionné pour une valeur de 3,6 milliards de dollars avec une société d'acquisition à but spécial (SPAC) dirigée par Brandon Lutnick, fils du ministre du Commerce Howard Lutnick. Cela reflète le sentiment du marché actuel : confiance, spéculation, et prêt à se développer à tout moment. Les entreprises agissent rapidement pour tirer parti de cet environnement favorable à l'innovation, aux introductions en bourse et à la croissance des actifs numériques.

Ce changement de ton n'est pas passé inaperçu : il a déjà modifié la manière dont les entreprises gèrent les infrastructures, les stratégies juridiques et la confiance institutionnelle.

La régulation insuffle une nouvelle vitalité à l'expansion des infrastructures.

L'ajustement du ton politique a déjà entraîné des changements concrets. Batyr Hydyrov, le PDG de Uminers, considère la position récente de la SEC américaine sur le minage par preuve de travail comme un catalyseur : « La SEC a clarifié que certaines activités de minage par preuve de travail ne sont pas réglementées par les titres, ce qui pourrait alléger le fardeau de conformité des mineurs. Ce changement, ainsi qu'une approche réglementaire plus large de la cryptographie, crée de nouvelles opportunités pour accélérer la réalisation des parties les plus ambitieuses de la feuille de route. »

Pour Hydyrov, établir une réserve nationale stratégique de Bitcoin est un catalyseur important. « Établir une réserve nationale stratégique de Bitcoin marque une acceptation croissante des crypto-monnaies par les institutions, ce qui pourrait encourager davantage d'investissements dans les infrastructures de minage. »

Pourtant, Hydyrov n’a pas baissé sa garde. « Nous intensifions progressivement nos investissements ciblés, en particulier dans les domaines où le risque réglementaire était auparavant plus élevé. Cependant, nous restons prudents : le cycle réglementaire est par nature imprévisible...... Nous ne considérons pas la situation actuelle comme une raison de ralentir ou d’être complaisant, mais plutôt comme une occasion de nous développer prudemment et de nous préparer à d’éventuels changements de politique mondiale.

Réglementation légale et accès équitable

Alors que le brouillard réglementaire se lève, le cadre juridique régissant la participation au marché est en train d’être redéfini. Frank Hepworth, fondateur de Yieldschool et ancien avocat spécialisé dans la réglementation, voit dans ce changement de politique un feu vert structurel pour le modèle décentralisé : « C’est un signal. Les entreprises on-chain ne veulent pas que leurs tokens soient échangés sur des plateformes réglementées par la SEC...... Les gouvernements acquiescent à l’entrée sur le marché d’entreprises ayant des avantages concurrentiels. Par conséquent, à mesure que le risque de pénalités diminue, on peut s’attendre à ce que davantage d’entreprises choisissent de faire du commerce on-chain.

Il pense que cette transformation est en train de bouleverser le système de régulation traditionnel. « Des avocats en crypto-monnaie de renom comme Gabriel Shapiro ont commenté que ce gouvernement est défavorable à leur secteur, mais globalement, cela représente un grand avantage... Je partage cet avis. »

Mais la critique la plus acerbe de Hepworth vise les règles d'admission obsolètes : « La conformité volontaire est saine... mais la réglementation contraignante conduit à des résultats inéquitables, et c'est précisément la cause fondamentale de l'inégalité des richesses aux États-Unis. » Quelle est sa vision ? « Le système de réglementation devrait être dominé par les cryptomonnaies et intégrer les cryptomonnaies comme élément natif. »

Ainsi, avec l'assouplissement du cadre juridique et l'accélération des innovations sur la chaîne, le prochain obstacle sera de nature psychologique : la confiance des institutions. Actuellement, l'industrie est à ce stade et commence à établir ses propres normes.

La transparence comme moyen de faire face à l'incertitude.

Même si la réglementation devient de plus en plus claire, elle n'est pas encore parfaite. Pendant la période de transition, il est essentiel de construire activement la confiance. Le GT Protocol dirigé par Peter Ionov se trouve à la pointe de cette zone. « C'est vrai, la tendance à l'assouplissement de la réglementation envoie des signaux complexes au marché. D'une part, l'assouplissement du contrôle réglementaire est généralement considéré comme un feu vert à l'innovation... mais d'autre part, le manque de cadre réglementaire clair inquiète également les participants institutionnels. »

Peter Ionov a déclaré que la réaction des investisseurs était toujours partagée : « Cela dépend en grande partie du type d'investisseur. Les entités plus flexibles et ayant une plus grande tolérance au risque... pourraient voir cela comme une fenêtre d'opportunité. En revanche, les institutions financières traditionnelles... ont tendance à rester prudentes, attendant des informations plus claires. »

Actuellement, une approche axée sur le marché pour établir la confiance favorise l'innovation responsable, en particulier dans les domaines où l'on souhaite moderniser les systèmes traditionnels : « L'ensemble de l'industrie se dirige vers un mécanisme de confiance basé sur la transparence... Les entreprises ouvrent le code source, publient des rapports d'audit et collaborent avec des fournisseurs agréés. »

Une réglementation plus souple est un catalyseur économique.

Avec l'augmentation de la transparence, la confiance des investisseurs croît, et grâce à l'innovation juridique, les canaux d'accès s'élargissent. La scène est déjà prête pour la prochaine étape : la mise à l'échelle d'idées audacieuses. Pour Construct Koin, cela signifie utiliser l'IA et la technologie blockchain pour transformer le financement immobilier. Le cofondateur Chris Baldrey-Chourio explique : « Alléger le fardeau réglementaire ne signifie pas abandonner les règles. Cela signifie créer de l'espace pour le développement de solutions dans le monde réel. »

Mais avec des concurrents mondiaux comme l'Union européenne et Singapour qui accélèrent leurs stratégies en matière de crypto-monnaie, il a émis un avertissement : « Les États-Unis sont actuellement en tête, mais si aucune action n'est entreprise, cet avantage ne sera pas durable. » Il a également souligné que le développement des normes autour des monnaies numériques de banque centrale et des stablecoins prend de l'ampleur.

Il est prudent face à l'expansion excessive, mais il pense que si l'application de la loi s'assouplit et est accompagnée de coopération, cela pourrait devenir un catalyseur pour l'expérimentation. « Nous avons besoin que les régulateurs et les constructeurs soient sur la même longueur d'onde. » « C'est ainsi que nous pourrons réaliser des percées tout en protégeant les consommateurs. »

De plus, ce dialogue doit être fondé sur des principes et des bases morales communs, et non seulement sur des intérêts communs.

Se concentrer sur l'éthique face aux chocs politiques

La comptable agréée et fondatrice du Crypto Accounting Group, Andrea Perlak, a pleinement développé ce sujet, en déclarant : « Les organisations et l'industrie du secteur Web3 se sont engagées depuis leur création à maintenir des normes éthiques élevées... Les comportements immoraux au sein de cette industrie sont odieux, et dans un secteur aussi petit, l'impact d'une mauvaise réputation est durable. »

Elle a réfuté le mythe selon lequel « la décentralisation signifie le chaos ». « La décentralisation et la responsabilité ne sont pas des concepts mutuellement exclusifs... Grâce à la transparence, à la gouvernance multicouche et aux mécanismes d'incitation, ces systèmes peuvent prospérer. »

Comme l'a souligné Perlak, l'idée que la réglementation dans le secteur des cryptomonnaies est en train de se relâcher est une méprise : « Penser que la réglementation du secteur des cryptomonnaies est en train de se relâcher est une erreur... Le précédent gouvernement avait une forte tendance à l'« enforcement »... Une fois qu'une législation appropriée sera mise en place, ce secteur respirera un peu mieux. »

Finalement, avec un cadre réalisable sur le point d'être mis en place, l'industrie ne fuit plus la réglementation - elle est prête à accueillir la réglementation sur des bases solides.

Résumé

Ces voix reflètent ensemble : un domaine en constante expansion passe du désordre à des normes communes, d'un système fermé à une innovation ouverte et éthique. Si l'industrie peut saisir cette opportunité, guidée par la transparence, l'éthique et l'inclusivité, non pas parce qu'elle y est contrainte, mais parce que c'est la bonne chose à faire, alors elle pourrait redéfinir le paysage de la finance moderne.